Jules, reviens !

  Sortie du métro, direction : université, bâtiment B. Sans voiture à l’horizon : situation rarissime, sans vélo frondeur, je traverse un large boulevard, le cœur léger, quand surgit de ma mémoire un refrain populaire : « A Paris, à vélo, … ». Puis, panne sèche : impossible de me souvenir de la suite, ni du début. Pourquoi ces mots, alors que la chaussée est étonnamment calme ? « A Paris, à vélo, la la la la la la la… » Cet air joyeux m’accompagne.

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Sourire au cimetière

  Les fleuristes ont amassé en rangs serrés des pots de chrysanthèmes. C’est la Toussaint. Orangés, jaunes, pourpres, ces capitules aux couleurs vives nous rappellent aux cimetières, aux tombes, aux larmes qu’on y a versées. Alors on aimerait ne pas en reprendre le chemin, même les bras chargés de fleurs.

  Pourtant, il arrive qu’une visite sur un site funéraire s’impose, inscrite dans le marbre des guides. Ainsi, qui a visité la Haute Egypte, a vu les tombeaux de la vallée des Reines, des Rois, des Nobles et des ouvriers. La nécropole des chats, à Sakkarah. En France, plus modeste et plus récent, il y a le cimetière marin, à Sète, dont les allées sous un ciel bleu d’été offrent une vue magnifique sur la Méditerranée ; sans Brassens mais avec Valéry. Chateaubriand repose, lui aussi, en hauteur, sur une toute petite île de l’Atlantique. Lui rendre visite demande patience et de bonnes jambes. Les flots de touristes guettent la marée basse depuis la cité corsaire pour grimper sur le rocher du dernier voyage. Y monter au plus vite, par défi sportif. En contemplant l’océan, par communion d’esprit. En curieux n’ayant que faire des dernières volontés de l’illustre : n’entendre que la mer et le vent.

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Proust ?

   Lundi matin, rencontre fortuite dans l’ascenseur avec une voisine au visage toujours empreint de tristesse. Après quelques années de salutations sommaires, nous parlons de la pluie et du beau temps quand, brusquement, elle me demande ce que je fais dans la vie.

– Prof de français. Et vous ?

– Psychanalyste.

 J’ai soudain l’impression d’être nue comme un ver à ses yeux noirs. Quelle sera la prochaine question ? Mais elle me raconte sa nuit d’insomnie qui l’a plongée dans la lecture d’entretiens de Marguerite Yourcenar ! Quelle femme ! s’exclame-t-elle. Quelle auteure ! Je lui confie, à mon tour, être impressionnée par cet écrivain, son style. Continuer la lecture de Proust ?

La panière du métropolitain

    Elle est souriante et pleine d’énergie malgré l’heure matinale. Dans sa tenue sponsorisée, elle accueille gaiement les usagers pressés qui frôlent sa panière sans beaucoup d’égards. Selon les jours et les saisons, des doigts avides et anonymes attrapent une barre de céréales, un baume à lèvres, saisissent une soupe lyophilisée ou un jus d’ananas avant de disparaître dans la bouche du métro.

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