Testicule

 Voilà, la rentrée est faite. Septembre n’est plus. Quelques feuilles jaunissent et bientôt les élèves réciteront l’automne, des vers les plus simples à des poésies plus alambiquées. Pourtant, l’été perdure. Il est là, au petit déjeuner, mystérieux. Il est au salon ou dans une chambre. Il nous poursuit encore au bureau, sympathique.

  C’est qu’un usage étonnant accompagne la rentrée : le cadeau de retour de vacances ! Ce souvenir inattendu, fruit d’un été qui ne fut pas le nôtre, qu’un proche nous offre, simplement parce qu’en le voyant, au bout du monde ou ailleurs, il a pensé à nous est des plus touchants !

    Ainsi, à notre insu, un ami a transporté avec mille précautions, ce plat en terre cuite qui jamais n’évoquera l’exotisme de nos vacances, mais pour toujours cet instant altruiste, ce geste généreux qui balaie d’un revers de main les présents attendus à Noël ou pour notre anniversaire.
– “ Tiens, c’est pour toi ! J’ai pensé que cela te ferait plaisir”, est la plus jolie déclaration de fin d’été.
Et peu importe ce qui l’accompagne : une confiture corse à la mandarine, un batik indonésien, des fleurs d’hibiscus séchées… On remercie mille fois, touchés, gênés parfois de ne pouvoir rendre la pareille.
Il est aussi une belle variante : les gourmandises déposées par la main anonyme d’une collègue sur un bureau, et qui disparaîtront vite. Adieu canistrelli, chocolats fourrés au beurre de cacahuètes, douceurs libanaises qui vous laissent du miel sur les doigts ! L’heure de la reprise a sonné. Au travail !

  Les enfants, prévoyants, sont rentrés avec le souvenir de leur choix : dauphins dans une boule à neige, coquillages, fer à cheval usé. L’ado du foyer, lui, part au lycée avec un nouveau tee-shirt noir, arborant : “Ég tala ekki islensku
– Ce qui signifie ?
– “Je ne parle pas islandais”… en islandais.
– ?!

   Parfois surgissent des cadeaux déroutants. Ceux de proches, sans autre égard que leur propre plaisir.
– J’ai ramené ça. C’est marrant , non ?

  A la maison, en cette rentrée, certains de ces souvenirs de vacances ont stationné quelques jours dans la cuisine, en observation. On les a regardés. On s’est interrogés. On dirait de la confiture, mais de quoi ?   Puis, un dimanche, on est partis à l’aventure, à petites bouchées, vers le cercle polaire… Et l’on a fini les pots; c’était délicieux ! Qu’avons-nous mangé exactement ? On se le demande encore.
– Et ça ! On en fait quoi ?

  Nous sommes maintenant début octobre et je suis encore stupéfaite de ce cadeau venu tout droit d’Australie : un décapsuleur ! Sur un gros bulbe à poils ras. Un testicule de kangourou !

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